Isle of Dogs : le retour de Wes Anderson à l'animation
Ambiance japonaise pour le deuxième film en stop motion de Wes Anderson, réalisateur de génie à qui l’on doit notamment Moonrise Kingdom, Rushmore et The Life Aquatic. Chacun de ses films impose un univers vaste et différent de ses autres projets. Isle of Dogs s’inspire du cinéma du maître Akira Kurosawa pour raconter une aventure futuriste qui questionne de nombreuses thématiques contemporaines.
Isle
of Dogs est une prouesse
technique. Chaque plan est d’une beauté éblouissante et d’une maitrise
incontestable. En terme de réalisation, il dépasse largement Fantastic Mr Fox, le premier film d’animation
de Wes Anderson. Les décors sont travaillés et les cadres toujours symétriques.
Le souci du détail est tel que l’on oublie qu’il s’agit de marionnettes. Ce
procédé d’animation a comme défaut son côté statique, chose que Wes Anderson parvient
à dépasser en donnant vie à chacune de ses marionnettes.
La structure du récit se veut segmentée en
parties, comme différents chapitres d’un livre. Wes Anderson joue sur ces
coupures comme pour montrer le scénario à l’écran. Les annonces de débuts et de
fins de flashback laissent sourire, tant ce sont des termes scénaristiques non
appropriés à l’écran. Isle of Dogs
est une histoire, un conte futuriste qui nous est raconté. Le morcellement du
récit ajoute un aspect comique lié à l’étrangeté de certaines séquences qui
apparaissent presque anecdotiques. Ce choix scénaristique sert également le
rythme qu’impose Wes Anderson. Les séquences s’enchaînent et pas question de
fermer l’œil durant ce marathon d’images. Seulement, avec la rapidité et le
nombre d’images et d’écritures, le film est difficile à suivre si l’on veut le
découvrir en version original.
Wes Anderson part des lieux communs pour
construire ses histoires sans redouter les clichés. Le japon de Isle of Dogs est caricatural mais
dénonce et aborde des thématiques actuelles. À travers l’île poubelle où les
pauvres chiens touchés par une épidémie de grippes se retrouvent parachutés et
livrés à eux-mêmes, difficile de ne pas réfléchir à l’état de la planète et aux
déchets. Le 21ème siècle est une période grise, tout comme l’île, où
les constructions de l’homme dépérissent, dysfonctionnent. Les humains
désertent des villes entières (un sujet abordé dans le documentaire Homo Sapiens de Nikolaus Geyrhalter) laissant la nature
meurtrie, sous le poids du capitalisme.
La démocratie est mise à mal dans la ville de
Megasaki dirigée par un maire tyrannique et colérique. En 2018, la question de
la démocratie est toujours aussi importante et délicate, surtout dans certains
pays d’Asie. Quant à l’aspect complotiste des autorités de Magasaki, Wes
Anderson ne pouvait être plus en phase avec l’actualité. L’affaire des agents
russes et de l’attaque à l’acide ressemble étonnement au destin du chercheur
scientifique de Megasaki qui cherche à guérir la grippe canine.
La frontière des
langues mais le combat universel, nous dit Wes Anderson. C’est un pari
audacieux de ne presque jamais traduire les passages en japonais, nous laissant
dans l’incompréhension tout comme ces chiens. Le dialogue se fait autrement. Le
paradoxe est que dans ce cas-ci, se sont les humains que l’on ne comprend pas
et non les animaux.
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