PETIT PAYSAN
Mardi
2 octobre, Hubert Charuel présentait son premier long-métrage au FIFF, à Namur.
Fils de producteurs laitiers et fraichement diplômé de La Fémis, a choisi de
raconter l’histoire d’un jeune agriculteur confronté à une épidémie et qui ne
se résout pas à perdre ses vaches.
Dès la première scène, le cadre est planté :
un petit paysan nommé Pierre (interprété par Swann Arlaud) se réveille dans une
chambre envahie par des vaches. Bien plus qu’un rêve, cette première
introduction au personnage met en avant son obsession pour son élevage. A 30
ans, il vit toujours chez ses parents et ne sort presque pas. Le petit paysan
est un trentenaire ordinaire, peu excentrique. Effrayé par les rumeurs
d’épidémie, il se rend compte qu’une de ses vaches présente les symptômes du
virus qui risque de décimer tout son troupeau. Il cache alors la vérité à sa
sœur vétérinaire. L’enjeu est tel que Pierre ne risque pas seulement de perdre
son travail, il risque aussi de perdre sa passion.
La caméra capte tout les instants que Pierre
passe à s’occuper des ses vaches, si bien qu’il est parfois difficile de se
rappeler l’aspect fictionnel de l’œuvre. Certaines scènes comme, par exemple, l’agonie
d’un veau, semblent tout droit sorties d’un documentaire, tant elles paressent
vraies. Pourtant, comme Swann Arlaud le rappelle, il ne s’agit que de cinéma. L’acteur
est totalement effacé et se met au service du film en optant pour un jeu très
minimaliste. Pour interpréter ce rôle, il a dû faire des concessions que peu
d’autres acteurs auraient acceptées. Aucune doublure n’est utilisée et c’est
bel et bien Swann qui effectue l’accouchement d’un veau et d’autres actions
auprès des vaches. Swann Arlaud et Anna Giraudau (qui elle joue une
vétérinaire) ont tous deux dû suivre une formation auprès de fermiers afin d’incarner
au mieux leurs personnages. Ce souci du détail efface toute comédie et
transforme radicalement les acteurs. Pour accentuer cette crédibilité, le
réalisateur a fait jouer son grand-père ainsi que ses parents, tous issus du
milieu agricole. Ainsi, les acteurs professionnels se confondent avec les
amateurs pour ne former qu’une seule famille.
Une autre belle trouvaille du film est
d’avoir fait de Bouli Lanners un fermier Youtubeur, avide de succès. Ses
petites vidéos viennent ponctuer le récit et renforcer les craintes du
protagoniste par rapport à l’épidémie. Le réalisateur, qui pensait ne jamais
pouvoir tourner avec le comédien belge, lui offre un de ses rôles les plus
drôles et justes. Sous ses allures de thriller, Petit Paysan comporte également une bonne dose d’humour. En jouant
sur cette légèreté, l’angoisse du protagoniste et la mort imminente de son
troupeau reste supportable pour le spectateur.
Le milieu agricole n’est pas seulement un
décor, il est aussi un moteur pour la fiction. Toute l’action se concentre sur
cette ferme et très peu sur l’extérieur. Le protagoniste sait d’où il vient et
ne renie pas qui il est. Hubert Charuel a réalisé un film à l’image de son
petit paysan : simple et authentique. En ne cherchant pas à épater ou émouvoir
le public au plus haut point, il approche son sujet de la meilleure manière qui
soit.
Clotilde Colson
Petit Paysan
de Hubert Charuel
France (2017)
Sortie en Belgique le 18 octobre
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