Burning : le mystère du feu
Appréciation : ****
Burning est un film simple, mais complexe, lumineux, mais sombre. C’est un des plus beaux films de l’année,
mêlant délicatesse, poésie et secrets. Il est difficile de croire que Lee
Chang-Dong est bel et bien reparti bredouille du Festival de Cannes cette
année.
Burning est l’adaptation de la nouvelle Les Granges brulées de Haruki Murakami.
Lee Chang-Dong arrive à la transformer en deux heures de film hypnotisantes. Burning part d’une histoire
simple : Jongsu (Yoo Ah-In) tombe par hasard sur une fille avec qui il
était à l’école, Haemi (Jeon Jong-seo). Les deux jeunes recommencent à se fréquenter
jusqu’au départ de Haemi en voyage. En revenant, elle n’est pas seule. Avec
elle, Ben (Steven Yeun), un jeune homme riche qu’elle a rencontré lors de son
voyage. Jongsu, qui a des sentiments naissants pour la jeune fille, est
intrigué par l’arrivée de cet autre homme dans la vie de Haemi. Tout le récit
est basé sur le non-dit. Les situations ne sont jamais claires et souvent dans
le film on se demande : « est-ce que c’est vrai ? ». Ce que
disent les personnages peut être sans cesse remis en question. Cela fait penser
à Apichatpong Weerasethakul et son merveilleux Cemetery of Splendour où à un moment du film, le personnage tombe
face à deux femmes se disant déesses.
Le spectateur est aussi perdu que Jongsu, ce
qui favorise l’empathie envers le personnage. Jongsu subit les situations sans
agir. Il est spectateur lui aussi. Lorsqu’il assiste au jugement de son père au
tribunal, il est assis au fond, seul, et regarde. Sa vie est vide et le moindre
élément peut la perturber. Après l’arrestation de son père, il retourne vivre
dans sa maison d’enfance à la frontière de la Corée du Nord. La seule compagnie
de Jongsu est la propagande récitée par les haut-parleurs nord-coréens.
L’arrivée de Haemi dans la vie de Jongsu est décisive. La jeune fille est
joyeuse, drôle, mais triste. Elle est insaisissable, comme la fumée. Les trois
comédiens du film sont époustouflants dans des rôles complexes et
mystérieux.
Le mystère est au cœur du film de Lee Chang-Dong. Lorsque le spectateur se demande ce qui existe ou non, il n’obtient
jamais de réponses. L’indétermination du film laisse au spectateur l’opportunité
de faire travailler son imagination. Plusieurs réponses sont possibles et il
est drôle de les confronter à la sortie de la projection. Burning fait partie de ces films qui donnent envie de les revoir
pour en trouver les indices et en déceler le sens. Au delà de la signification,
Burning est beau. Les levers ou couchers
de soleil, la brume, la pluie : l’image marque l’esprit et colle à l’intensité
des séquences. Les musiques se font rares, mais lorsqu’elles arrivent, elles
transforment directement les scènes en moments magiques. Burning m'a complètement retournée.
Burning
de Lee Chang-Dong
Corée du Sud (2018)
Actuellement au cinéma
Clotilde
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